jeudi 20 février 2014

Visiting Lórien


(The French version of this post is actually a bit longer... when I translated it from the English, I found I had more things to say. And there are more pictures, including a drawing of a tree that looks a bit like Pina Bausch to me :o)


One of my favourite aspects of living in Montreal (along with its truly welcoming personality) is that each of its four seasons allows you to travel in space, as well as in time.


Icy stars floating on the grass.

Spring, for instance, visits us briefly during the first two weeks of May – until then all the trees are still bare – and it is bewitching in a way that I have never experienced in Europe. It takes you to a kind of  Lórien where Maple trees rule the city, overwhelming the streets with fragrant bouquets of tiny, yellow-green flowers.

You can almost see them opening up.

Montreal summers are tropical in many ways, including the relaxed atmosphere, and the fact that even a single sheet is too warm on your skin at night, with windows wide open. Then as soon as mid-September (usually), autumn brings a mountain-like quality to the air and light; warm, golden afternoons alternate with crisp, clear nights.

This radiance of bright-coloured leaves is quite ephemeral and dream-like, too.

In winter, it’s like Scandinavia here (everybody’s sliding, cross-country skiing, skating or snowshoeing, even in the heart of the city), except we get as many hours of daylight as people in Bordeaux, France, being on the same latitude. Which is nice, particularly when the sky is such a deep blue, and temperature regularly drops to - 22 C several days in a row, usually with a - 28 C wind chill (- 18 F).

Mont-Royal Cemetery.

I have been attracted to Scandinavian countries – winters, summers, spirit, and languages included – since I was maybe twelve or so... Walking through wide expanses of glimmering snow, or even seeing skaters in every park, still feels to me like traveling to a lovely foreign place.

In Parc Lafontaine.

Even at home, since I can’t afford to heat much, I layer woollen sweaters and skirts in a Scandinavian kind of outfit, complete with striped socks, mittlets, and knitted pointed hat  :o)


In a Swedish garden...

Love this little cape.

By mid-February, however, I often find myself longing for summer, as I long for a friend I haven’t seen in months, and miss dearly. I need to be hugged by the warm wind, I want to offer my bare legs and shoulders to its touch, and to ride my bike everywhere.


Ink on paper.


Also, I miss my friends the trees – whose crown is revealed in intricate detail on the winter sky – because I can’t have my usual happy conversations with them. Half asleep, they are patiently enduring the cold and stillness.

Roots criss-crossing on the surface: a common sight in Montreal parks.

But the simple sight of these hundreds of Maple buds-in-waiting, right there in the middle of winter, makes me sigh with gratitude, and a secret pleasure.

On the Mont-Royal.

I guess my favourite time of the year is June, when everything is still blooming and pulsing with joy; the days extend well into the evening, and the evenings are so soft that they make you cry. And yet, it is very frustrating to have other obligations – like working and sleeping – distracting me from this pure bliss. 

And don't even get me started on Peonies.

So I find that I am most creative and balanced in September… Maybe because it's my birthday month :o)

Do seasons affect you a lot, in a positive or negative way? Which is your favourite one?


samedi 8 février 2014

Portraits - premières leçons


Mes débuts dans l’art du portrait ne furent pas très prometteurs.

Ce pourrait être moi vers six ans... mais cela ne ressemble pas à mes dessins de l'époque.

Enfant, je dessinais tout le temps des visages dans les marges de mes cahiers, de préférence en classe. Sans avoir à l’esprit quelqu’un de précis, je laissais mon crayon suivre un profil imaginaire, ou je m'essayais à faire apparaître deux yeux, un nez, une bouche.

Même si tous ces éléments s’harmonisaient entre eux (ce qui n’était pas toujours le cas), j’échouais souvent à l’étape finale : tracer le contour du visage. J’avais du mal à recréer cette mystérieuse ligne qui relie les tempes, les pommettes, le menton. Ou la forme des cheveux. Je m’y essayais rarement, car le résultat était maladroit et peu plausible.

Le problème – j’en prends conscience aujourd’hui seulement, en écrivant ces lignes – venait du fait que je visualisais la chose en deux dimensions. Mes modèles inconscients étaient les illustrations des albums et des romans jeunesse que je lisais à l’époque... Il ne me vint jamais à l’idée de regarder mes professeurs et camarades de classe pour y trouver des informations sur les pommettes et le menton :o)


L'actrice Judith Godrèche photographiée par Paolo Roversi

On note une évolution intéressante de ce phénomène à l’adolescence, puisque mon inspiration venait alors essentiellement des photos trouvées dans les magazines. Je n’y cherchais pas délibérément des modèles : ils s’imposaient à moi. Au détour d’une page, j’étais interpelée par un regard, une présence – il fallait que je dessine ce visage.

Je travaillais au crayon HB ou B, en faisant largement usage de ma gomme; mes portraits étaient très réalistes, révélant les volumes et les ombres, les reflets dans les yeux, le satiné de la peau. Je passais des heures sur chacun d’entre eux, dans une sorte de transe. Un visage apparaissait sur le papier, par l’intermédiaire de mon crayon ! Si je faisais attention.

Il fallait être passionnée, persévérante, précise – et prudente.

Cependant mon dessin venait toujours d’une image, et s’en trouvait limité. Si la photo laissait une partie de la tête hors du cadre, je n’arrivais pas à l’intégrer à mon dessin de manière satisfaisante.

Elle était sur la couverture d'un catalogue.
Voir aussi dans la version anglaise, plus bas.

J’étais donc convaincue que je ne saurais jamais dessiner de mémoire, ni même avec une personne en face de moi. Et donc, de toute évidence, je ne pouvais pas devenir illustratrice, alors que c’était le seul métier qui m’ait jamais attirée.

Un soir pourtant, mon plus jeune frère, Benoît, qui avait environ dix ans à l’époque, lisait un livre dans le canapé. Personne d’autre dans le salon : j'ai commencé à esquisser son portrait, sans être précise ni prudente. À ma grande surprise, non seulement le résultat était (pour une fois) libre et naturel, mais c’était tout à fait lui.

J’ai ressenti un étrange vertige – et si finalement je pouvais dessiner d’après modèle ? … mais que se passerait-il si je laissais mes espoirs grandir, pour m’apercevoir que je n’étais pas assez douée ? – alors j’ai rangé le dessin, et je n’ai pas fait d’autres tentatives. (Cela éveille-t-il des échos chez certains d’entre vous ?)


Je n'ai pas retrouvé cette esquisse, mais en voici une autre, cette fois de mon frère Matthieu.
Je l'ai réalisée à Montréal, en partie de mémoire (je voulais le représenter tel qu'il était adolescent),
et en partie d'après une photo récente de lui, adulte.

L’étape suivante a consisté à explorer le monde par l’intermédiaire de la photographie. Je m’étais acheté un Minolta X-300s d’occasion, et le fait d’avoir cette boîte de métal entre les mains, de pouvoir regarder mon environnement à travers l’objectif, me donnait parfois l’audace qui, en tant que jeune fille timide, me faisait généralement défaut.

À l’époque, je trouvais très difficile de regarder les inconnu(e)s dans les yeux, et plus encore de leur parler. Mais j’ai quand même demandé à plusieurs étudiantes (que je connaissais à peine de vue) si elles voulaient bien poser pour moi, ainsi qu’à une femme rencontrée dans les rues de Paris, Alison, dont la beauté m’avait frappée.

Il s’est avéré que c’était une comédienne et artiste américaine, basée à New York mais amoureuse de Paris, où elle séjournait régulièrement. Si vous la connaissez, faites-le moi savoir, car j’ai oublié son nom !

La belle Alison.
Je l'ai revue à Montréal bien plus tard, par un heureux hasard : elle s'était assise quelques instants, 
les yeux fermés, dans la librairie où je travaillais à l'époque. 
Je l'ai aussitôt reconnue... Elle se souvenait très bien de moi.

Pour ces portraits j’utilisais toujours du film noir et blanc, et je projetais les négatifs sur du papier Ilford dans ma cuisine/chambre noire. À nouveau je regardais, émerveillée, les visages émerger à la surface du papier. Je travaillais encore principalement avec l’ombre et la lumière, cherchant des paysages dans la courbe des pommettes ou la ligne des sourcils, mais j’étais désormais plus sensible à la présence de chaque personne.


Quand j'ai vu cette petite fille au bureau de poste, 
je n'ai pas pu m'empêcher de demander à sa maman si je pouvais faire des portraits d'elle.
J'ai pris les photos quelques jours plus tard, dans un jardin.

D'importants changements sont survenus dans ma vie peu après, si bien que la suite prend place à Montréal, où je pouvais enfin être moi-même, mais aussi beaucoup plus à l’aise avec les autres, et où je pouvais me réapproprier mes rêves d’enfant. J'ai donc fini par m’inscrire à un cours de dessin avec modèle vivant, et j'ai découvert que j’étais incontestablement douée pour la chose.

C’était tellement libérateur, exaltant et gratifiant de voir un corps, un visage, une posture apparaître sur ma grande feuille, cette fois de façon fluide, concentrée et habitée, parfois en quelques minutes. Les modèles s’incarnaient littéralement à travers ma main. C’était magique.

Voilà pour vous, monsieur Doute et madame Oui Mais  ;o)

Esquisse réalisée en quinze minutes dans un atelier libre de modèle vivant.

Depuis, je dessine des gens à leur insu dans mon petit carnet, surtout à la faveur des trajets en train, car tout le monde est occupé à lire ou regarder dehors. J’ai récemment mis en route un projet d’exposition autour de portraits d’inconnus. Et j’offre maintenant (merci à Rachel pour ses encouragements) mes services comme portraitiste.

:o)

Vous en saurez plus lors de mon prochain billet sur le portrait, chers lecteurs :o)


PS – La version anglaise est parue juste en-dessous, sous le titre Portaits – First Lessons. Vous y trouverez une sélection d’images complémentaire à celle-ci.

jeudi 6 février 2014

Portraits - First Lessons


My early beginnings in the art of the portrait were not very promising.


This could be me at 6 or so... not what I was drawing at the time, though.

As a child, I used to draw faces in the margins of my exercise books all the time (particularly at school). I was not thinking of a person or character; it was a form of doodling in which my pencil would follow an imaginary profile - or a pair of eyes, a nose, a mouth.

Even if all these elements turned out to be nicely balanced, I often failed in the final step: drawing the elusive line going from the temples and cheekbones to the chin. Or the actual shape of the hair around the head. When I did try, the result was always awkward and strangely empty.

The trouble was – as I realize now, writing this post – that I was visualizing faces in two dimensions. My (subconscious) models were the illustrations from the picture books and novels I was reading at the time. It never occurred to me that I could look at my teachers or classmates for chin or cheekbones information :o)


French actress Judith Godrèche, by Paolo Roversi.

There was an interesting twist on this during my teens, when my inspiration came from photos in the magazines. I was not looking for it there: it simply found me. Once in a while, a particular face would call me from the page, and I knew I had to make a drawing out of it.

At the time I worked with a HB or B pencil (my eraser was involved a lot), and my portraits were very realistic: they revealed the shapes and the shadows, the reflections in the eyes, the glow on the skin. I would spend hours on each one, as in a trance. There was a real face coming up on the paper, through my own pencil! If I was careful enough.

I had to be passionate, perseverant, precise - and careful.

Yet, my drawing always stemmed from a picture, and was limited by this. If the photo left a part of the head out of the frame, I could not integrate it to my portrait in a satisfying way.

She was on the cover of a catalogue.

So I was convinced that I would never be able to draw from memory, or even from a real person in front of me. And therefore, obviously, I could not be an illustrator. Too bad if it was the one career that had ever attracted me.

One evening though, my youngest brother, Benoît, who was around 10 at the time, was reading a book in the sofa. Nobody was watching me: I actually sketched his portrait, without being precise or careful. Instead, my drawing was intuitive, focused and calm. To my surprise, the result was not only (for once) natural and free – it was totally him.

I couldn't find that early drawing, so instead here is my other brother, Matthieu.
I made this portrait in Montréal a few years ago, partly from memory 
(I wanted to capture his teenager self) and partly from a picture of him as an adult.

However, I was scared by the implications of this – what if I could draw from life after all? ... But what if I Let My Hopes Grow, only to find out that I was Not Good Enough? – so I put the portrait away, and did not try again. (Sounds familiar to some of you?)

Then, I reached another interesting stage: exploring the outside world with photography. Somehow, having this black metal box in my hands, and being able to look at my surroundings through the lens (I had purchased a second-hand Minolta X-300s) allowed me to behave in a bolder way that my usual shy self would.

At the time, I found it very difficult to look back at strangers, let alone talk to them. But I did ask several girls if they would agree to pose for me, including Alison, a beautiful woman I met in the streets of Paris. She turned out to be an American actress and artist, based in New York city and in love with Paris, where she stayed regularly. I wish I could remember her full name…

Beautiful Alison. I met her again in Montréal years later, by pure chance - she was sitting for a few minutes, eyes closed, in an armchair, in the very bookstore where I was working at the time. I recognized her instantly, and she remembered me quite well.

They were all black and white portraits, printed on Ilford paper in my kitchen/darkroom. Again, I would observe these faces with awe as they emerged from the pale paper; but now my perception was getting closer to the presence of each person, even if I was still (at least consciously) working primarily with light and shadow, and looking for a landscape in the curves of the cheekbones, the line of the eyebrows.

When I saw this little girl in the post office, I just had to ask her mother if she would pose for me.
It took the pictures a few days later, in a garden.

Big changes happened in my life soon after that, so the next stage takes place in Montréal, where I was able to be myself at last, but also much more at ease with everybody else, and in touch again with my childhood dreams and hopes. So I registered in Life Drawing classes, and discovered that I was pretty good at it!

How liberating, thrilling and rewarding to see a body, a face, a posture appear on my big white page, this time in a very free, focused and inspired way, sometimes in a few minutes. They were literally unraveling themselves through my hand. It was pure magic.

Here is to you, Mr. Doubt and Mrs. What-If  ;o)

15 minutes sketch. This guy was a particularly good model, for some reason.

Since then, I have been drawing people (unbeknownst to them) in my small notebook, mostly in trains where everybody is reading or looking outside. I have recently started a portrait project for an exhibition, involving strangers. And – thanks Rachel for your encouragements – I am also offering my services as a portraitist.

More on this in the next related post, dear readers  :o)


PS - An additional selection of drawings and pictures can be seen in the French version.